Ma dernière lettre est pour toi...

J'écris à toi qui liras cette lettre, à toi qui pourra comprendra ma folie, et je prie tous les dieux de la terre pour que tu puisses un jour me pardonner.
Je suis né loin d'ici, comme toi sans doute, j'ai eu une vie simple, parfois dure. Comme toi j'ai contemplé le ciel et j'écoutais le chant des oiseaux. Et pourtant tout se termine pour moi ce soir, alors que le crépuscule recouvre les cieux de son long manteau pour la nuit. Pourtant je sais déjà qu'un jour tu trouveras mes écrits, que tu les liras et que tu chercheras à comprendre mes choix. Je m'excuse par avance si ce que je vais te raconter te rendra triste, si tu pleures je ne pourrais pas te consoler, alors s'il te plait… Souris.

J'ai un pouvoir, un pouvoir terrifiant. Dans mes rêves je peux tout voir, voyager partout, dans le temps et l'espace. Je ne le contrôlais pas étant enfant, et il m'est arrivé souvent de crier la nuit dans mon lit. Encore maintenant cela m'arrive, mais je ne suis plus seule…
Mais ne crois pas que ce don est un fardeau, avec lui j'ai pu sauver mon peuple, j'ai soulagé les maux de tant de personne qu'ils ont fait de moi une sorte d'animal qu'on met en cage et qu'on regarde de loin avec un mélange de crainte et d'admiration. Malgré cela je peux encore dire que je suis heureuse d'être en vie aujourd'hui. Mais je me demande toujours pourquoi seul mon avenir et mon passé ne me sont pas accessibles? Pourquoi chaque jour, ma mémoire s'efface avec le temps qui passe…

Pour me protéger on m'a offert un double, un jumeau protecteur, fort et puissant. Tout mon contraire en somme. Et cette personne c’était toi.
Quand j'avais besoin de toi, tu apparaissais. Tu étais toujours là pour moi. Quand j’étais attaqué, pour me réconforter après un cauchemar, tu étais toujours avec moi quand j’allais mal, jamais quand j’allais bien…
Mon sourire te faisait disparaître, devais-je arrêter de sourire ?

Tant de gens dépendent de moi, de mes prédictions, je devais survivre. Mais pourtant je t’aimais, oh oui je t’aimais autant qu’il est possible de l’imaginer. Je me mettais parfois en situation périlleuse juste pour t'apercevoir quelques instants. Mais à présent c’est terminé. D’autres personnes sont venus à moi, des murailles me séparent du monde extérieur, je ne crains plus rien dans cette prison de pierre d’où je ne peux m’échapper que par mes rêves. Mais où que je vole, tu n’es jamais là. Dès que ton souvenir refait surface dans mon esprit il s'efface aussitôt. Je ne peux même plus te parler.

Toi aussi tu as sans doute connu la guerre, tant qu’il y aura des hommes assez stupides pour se battre, la guerre existera. Je n’ai pas vu de fin à ce temps de conflits, pourtant l’avenir je l’ai exploré souvent. La haine est un sentiment que je ne peux pas appréhender, mon cœur déborde déjà tellement d’amour qu’il est impossible d’y rajouter quoi que ce soit. Parfois je voudrais être capable d’haïr ceux qui m’ont ainsi enfermée, mais je ne peux pas. Et toi, aurais-tu pu m’apprendre ce que c’est que de vouloir la mort d’un autre être vivant ? J’aurais tant souhaité te connaître, profiter de tes conseils avant qu’il ne soit trop tard…

Tu est revenu avec la guerre, quand le sang a coulé tout autour de moi tu es réapparu du néant. À cause de moi tu es voué à passer ton existence dans la souffrance, la haine et le combat. Quand je n’ai pas besoin de toi, tu n'existe pas. Tu ne vis que dans l'attente de me servir, et je ne peux même pas te récompenser, si tant est qu’il y ait quelque chose que je puisse te donner en retour de ton sacrifice. Si tu venais à être blessé par ma faute, je m'en voudrais à mourir. Pour toi qui n'existe que pour moi, je voudrais pouvoir vivre uniquement pour te servir.
Si seulement j'étais un homme je pourrais te protéger, si seulement j'étais toi…
Je voulais changer nos places, te donner la vie que je t’avais prise. Mon pouvoir ne servait à rien, les hommes n'ont pas besoin de connaître le passé, le futur… Tout ce qui compte c'est de vivre cet instant, sans toute cette haine qui nous empoisonne insidieusement.

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(Version de Kei)

-"Hou là, regarde un peu celle-là… »éructa le plus vilain des trois loubards qui me dévisageaient d’un œil torve.
-« hey ! Bébé, tu es parfaite !" me lança-t’il en s’approchant avec un de ces sourires vicelards que je détestais tant. Je lui envoyais mon pied dans la figure ce qui eut pour effet secondaire de le projeter par terre.

Alors que je tenais toujours ses lettres dans une de mes mains, de l’autre je dégageais les longs cheveux de mon visage. Bien sûr, j’étais une guerrière !
Je contemplais à mon tour mon physique, cette poitrine n'était pas pour me déplaire, mais être une femme était bien différent de ce que je m'étais imaginé. Je comprenais enfin sa détresse, sa solitude… Elle s'était battue seule contre tout cela, elle m'avait caché cette fragilité qu'on pouvait ressentir avec ce corps. Elle avait… disparu, pour toujours. Je serrais mes bras autour de moi, de son corps qui était devenu le mien… Ma force ne me permettrait sans doute jamais d'avoir à faire appel à elle, et quand bien même que pourrait-elle faire ? Au final, elle ne servait à rien. A part me donner sa vie, mais j'aurais préféré un corps un peu plus solide et puissant. Quelque chose qui fasse peur, qui soit assez effrayant pour que mes ennemis s’enfuient à mon approche, pas qu’ils se jettent sur moi pour tenter de me violer…

Je termine enfin la lecture de ces quelques feuilles que j’ai trouvé près de moi en me réveillant. Même si j’ignore qui je suis, je sais que ces pages me sont destinées.

Adieu mon amour, là où je vais, il n'y a pas de place pour toi.

Il n’y a pas de signature, qui donc pouvait être assez stupide pour écrire une histoire aussi invraisemblable ?
Pourquoi ces larmes sur mes joues ? Cela ne me va pas du tout !
Je chiffonnais ces lettres sans importance et souriais au soleil qui se levait. Quelque part là-haut un ange souriait aussi, mais j’étais bien incapable de le voir.

! Très jolie plume,
Très belle histoire !
C'est triste et beau !